dimanche 25 mai 2008

L'antre de la folie

Un agent d'assurance, John Trent (Sam Neill, excellent), est chargé par le directeur d'une maison d'édition (Charlton Heston, savoureux) de retrouver la poule aux oeufs d'or de la boîte, Sutter Cane (Jurgen Prochnow). L'écrivain d'horreur a disparu, et avec lui son dernier manuscrit... Trent, cartésien jusqu'au bout des ongles, va doucement basculer dans la folie alors qu'il se rend compte que le monde décrit par l'écrivain est on ne peut plus réel.

Réalisé en 1995, "L'antre de la folie " est, avec "Le Prince des ténèbres", le métrage le plus terrifiant réalisé par John Carpenter. La relation acteur-personnage-réalisateur-spectateur est ici portée à son paroxisme: lequel de ces actants du cinéma joue avec les autres, lequel mène la danse? Cette question, Carpenter se la posait déjà brillamment dans le classique de 1978 "Halloween" avec l'utilisation de la caméra subjective (on ne sait jamais vraiment quand il s'agit d'un simple plan de caméra ou des yeux de Michael Myers, le tueur du film) et tente une réponse avec ce film (à noter qu'il ira encore plus loin dans cette réflexion avec l'incroyable "La fin absolue du monde", épisode de la saison 1 des Masters of Horror que je vais bien finir par présenter sur ce blog). John Trent, au départ maître de son destin, devient le pantin de l'écrivain Sutter Cane. Le film est servi par un casting absolument fabuleux, que ce soit dans les rôles principuax ou dans la figuration: chaque personnage est d'une crédibilité à toute épreuve.
Le film mélange les références réelles (on ne peut s'empêcher de penser à Stephen King avec le personnage de Cane vivant tranquille dans un petit village; le personnage principal porte le prénom du réalisateur, ...) et la culture fantastique (nombreuses références à l'oeuvre de l'écrivain H.P. Lovecraft, la scène de la "contortionniste" rappelle furieusement Mégane dans "L'exorciste", les cerbères de la mythologie grecolatine, l'église de "La Malédiction", le village dont on ne peut sortir rappelle "Le prisonnier", le cycliste rappelle furieusement certaines scènes de la psychédélique série "Twin Peaks" de Lynch, ...).

Carpenter s'amuse furieusement dans ce film, ainsi que Sam Neill qui aurait pu devenir une véritable icône du cinéma d'horreur (il avait déjà joué dans le fabuleux "Event Horizon" et dans le sympathique "Jurassic Park"), à l'instar d'un Jeffrey Combs ou d'un Bruce Campbell, s'il avait eu la "malchance "de commencer sa carrière dans ce créneau (les deux acteurs cités en comparaison, pourtant excellents, n'ont jamais eu la confiance des producteurs pour jouer dans d'autres types de films). Dotés de scènes mémorables (je ne me lasserai jamais des tentatives de fuites avortées de Trent...qui revient à son point de départ à chaque fois!), le film offre quantité de niveau de lecture différents; c'est à celà que l'on repère un classique.

Il est à signaler qu'il ne faut surtout pas se fier au packaging fastueux de l'édition DVD Metroplitan; les bonus sont peu utiles: Carpenter ne sait décidément pas parler de ces films face à une caméra (faut dire, en sept minutes!), le reste n'est que du merchandising. Seule l'interview de Greg Nicoreto (disciple de Tom Savini, maître des effets spéciaux craspecs) est agréable à suivre. Le seul mérite de cette édition DVD, et c'est tout ce qu'on lui demande, est une copie irréprochable de ce film majeur du cinéma fantastique américain. Pour ceux qui voudraient s'informer sur l'oeuvre de Carpenter, je conseille la lecture de "Mythes et Masques, les fantômes de John Carpenter" et de "John Carpenter par John Carpenter".

Carpenter prouve une fois de plus avec ce film qu'il est l'un des cinéastes indépendants les plus importants des trente dernières années. Un classique à voir et à revoir!

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